Tout n’est pas vert dans les biocarburants

Publié le : 27 octobre 20218 mins de lecture

La production d’énergie à partir de la combustion de la biomasse, directement ou par le biais de combustibles tels que l’éthanol, est présentée comme une alternative durable aux combustibles fossiles. Mais cela en vaut-il la peine ? Bien que les biocarburants soient renouvelables, d’autres facteurs socio-environnementaux doivent être pris en compte, tels que l’option pour la monoculture, le fait que moins de terres sont utilisées pour la production alimentaire, et aussi l’émission de gaz à effet de serre. Malgré cela, plusieurs pays ont investi dans ces sources d’énergie. Selon l’Energy Research Company (EPE), le pourcentage de biomasse utilisé au Brésil tend à augmenter jusqu’en 2030.

Qu’est-ce que la biomasse ?

On peut considérer comme biomasse toute ressource renouvelable issue de la matière organique – d’origine végétale ou animale – dans le but principal de produire de l’énergie, selon le ministère de l’environnement. La définition couvre les matières premières utilisées à la fois pour produire de l’électricité et pour générer des combustibles solides (charbon de bois), liquides (biodiesel, éthanol) ou gazeux (biogaz).

Le principal argument pour que l’utilisation de la biomasse soit considérée comme durable est qu’il s’agit d’une source d’énergie renouvelable, puisqu’il est possible de créer de nouvelles cultures après avoir brûlé les matériaux, formant ainsi un cycle de production qui ne s’arrête pas. En revanche, les combustibles fossiles mettent des millions d’années à se reformer et peuvent donc être épuisés.

Dans une interview, José Manuel Cabral, de l’Embrapa, défend les biocarburants d’un point de vue social : le marché de la biomasse permet une production décentralisée, avec divers producteurs dans différentes parties du monde. D’autre part, les combustibles fossiles sont contrôlés par quelques grandes entreprises et uniquement dans les pays qui possèdent des gisements.

Problèmes liés à la production 

Mais le processus de production n’est pas aussi favorable qu’il n’y paraît. Les plantations sont établies en monoculture, ce qui accélère l’érosion des sols et réduit la biodiversité dans la zone cultivée. En termes sociaux, les monocultures empêchent la croissance des petits producteurs, en concentrant les terres dans les mains des moyens et grands agriculteurs.

Un autre problème est que les plantations peuvent entrer en concurrence avec des zones qui devraient être principalement réservées à la production alimentaire. Cela se produit principalement dans le cas de l’éthanol, de la canne à sucre et du maïs, car de nombreux agriculteurs qui avaient l’habitude de vendre leurs produits à des entreprises alimentaires ont commencé à les vendre à des centrales énergétiques pour obtenir un meilleur profit. Le résultat a été une diminution de l’offre de nourriture et une augmentation des prix.

En 2008, au plus fort du débat sur la crise alimentaire, une étude de l’université de Californie a publié que la production d’éthanol avait augmenté le prix des aliments aux États-Unis de 18 %. Augmentation de 39 % des prix des denrées alimentaires aux États-Unis. Le rapport de l’organisation non gouvernementale Action Aid de 2012 indique que d’ici 2020, le prix du maïs pourrait augmenter de 22 %, celui du sucre de 21 % et celui du blé de 13 %. En outre, il souligne que les biocarburants ont tendance à rendre les prix des aliments plus instables. En effet, la demande de biodiesel augmente ou diminue en fonction du prix du baril de pétrole, ce qui a une incidence sur l’industrie alimentaire.

Pour Action Aid, l’une des plus grandes préoccupations de la crise alimentaire est l’augmentation de la faim dans le monde, en particulier dans les pays sous-développés où les niveaux de pauvreté sont élevés. Elle peut également entraîner des problèmes de santé dans le monde entier, car la population peut commencer à acheter des aliments moins chers et moins sains.

Bioélectricité et ses effets

Les exemples les plus courants de biomasse pour cette utilisation sont les arbres, tels que les eucalyptus et les pins, certains types d’herbe, la paille et, dans le cas du Brésil, la bagasse de canne à sucre.

Selon l’initiative Green Campus Harvard, la combustion de la biomasse peut libérer dans l’atmosphère la même quantité de CO2 que la combustion du charbon et, bien qu’elle en libère moins que le gaz naturel, elle dégage même plus de polluants. Par rapport aux combustibles fossiles, elle ne présente que des avantages par rapport au pétrole. Alors pourquoi les gouvernements investissent-ils dans la biomasse ?

L’un des arguments du Biomass Energy Center du Royaume-Uni est qu’il faut considérer que les plantations sont capables d’absorber du dioxyde de carbone pendant leur croissance, ce qui permettrait de former un cycle dans lequel elles réutiliseraient elles-mêmes le CO2 libéré lors de la combustion de l’ancienne récolte. Toutefois, le centre prévient qu’une organisation est nécessaire pour mener à bien ce cycle.

Un problème possible lié à l’absence de planification serait de consommer la biomasse plus vite qu’elle n’est produite, ce qui entraînerait une augmentation des gaz à effet de serre dans l’atmosphère et la déforestation de la zone. Le Biomass Energy Center estime qu’il est possible que la quasi-totalité du CO2 puisse être réabsorbée si la culture est contrôlée. Cependant, ce processus peut être lent, selon Greenpeace la réabsorption peut prendre des décennies, ce qui provoquerait un déséquilibre entre la combustion et le recyclage du dioxyde de carbone.

Une étude de Greenpeace Canada, par exemple, montre que l’industrie locale de l’énergie électrique dépasse les limites qui permettent de maintenir une production durable. Le bois de chauffage y est la principale biomasse utilisée et, avec l’augmentation de cette forme de production d’énergie, la déforestation des forêts indigènes s’accentue.

L’autre moyen de produire de la bioélectricité serait d’utiliser les résidus d’autres plantes. Au Brésil, la bagasse de canne à sucre est l’une des plus utilisées. Autrefois, la bagasse de canne à sucre était classée comme un déchet très polluant, mais aujourd’hui, de nombreuses usines de fabrication de sucre-alcool l’utilisent pour subvenir à leurs besoins énergétiques. Les autres restes qui peuvent être utilisés sont la paille de canne, les pelures de fruits comme l’orange et la noix de coco, ainsi que les coquilles de riz et de noix. En général, cette production est ponctuelle et plus fréquente dans les endroits isolés du réseau électrique.

Les ordures comme alternative

Dans un rapport de 2013, Greenpeace indiquait quelques mesures pour que l’Union européenne remplace les biocarburants jugés nocifs. Par exemple, ils ont conseillé d’économiser, d’ici 2020, 15 % de l’énergie dépensée pour les transports. Pour ce faire, ils suggèrent d’investir dans de nouvelles technologies pour accroître l’efficacité des transports et réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le processus de raffinage des carburants à base de pétrole et de gaz. En outre, la priorité devrait être donnée aux systèmes ferroviaires plutôt qu’aux routes.

Un autre objectif est de limiter l’utilisation des terres pour la production de biodiesel, afin d’atteindre zéro d’ici 2020. Ils conseillent également d’augmenter de 3 production d’énergie à partir de déchets organiques et produire 1 plus d’électricité renouvelable pour les transports routiers et ferroviaires.

Mais enfin, la biomasse peut-elle être utilisée de manière durable ? Selon Greenpeace, il existe deux situations. Il y a la production incontrôlée qui aggrave les émissions de dioxyde de carbone et déforeste des zones, et il y a aussi des moyens qui ne nuisent pas à la nature. Ils considèrent qu’il est conseillé de n’utiliser que les restes d’autres plantations et usines, c’est-à-dire des sources qui ne nécessitent pas de nouvelles terres pour la production.

Plan du site